| | | |

Malgré sa caution acceptée, Tahirou Sarr reste en détention

La demande de liberté provisoire introduite par les avocats de Tahirou Sarr a de nouveau été rejetée par le Collège des juges d’instruction du Pool judiciaire financier (PJF), ce mardi 3 juin 2025. Et ce, malgré la constitution de solides garanties : 11 milliards FCFA consignés en numéraire, et trois biens immobiliers hypothéqués pour une valeur cumulée de plus de 20 milliards FCFA. Une ligne de défense jugée suffisante par ses conseils, mais balayée par une justice qui, elle, affiche une rigueur perçue par certains comme excessivement politique. Pourtant, tous les feux semblaient au vert. Les garanties foncières ont été validées par ordonnance judiciaire, dûment inscrites au Livre foncier, sans contestation du parquet ni de l’Agent judiciaire de l’État. Le silence des autorités avait nourri chez la défense l’espoir d’un infléchissement. Mais c’était sans compter sur la fermeté du Collège des juges, qui a choisi de maintenir Tahirou Sarr en détention, invoquant la gravité des faits et les risques liés à l’instruction en cours. Les accusations portées contre l’homme d’affaires ne sont pas anodines : détournement présumé de fonds publics, blanchiment de capitaux, montages financiers opaques et circuits de rétrocommission. Un dossier explosif, alimenté par un rapport de la CENTIF qui évoque des milliards encaissés sans fondement contractuel, en lien avec des entités publiques et privées encore à identifier. Mais au-delà du droit, l’affaire Tahirou Sarr soulève des interrogations politiques. Pour ses soutiens, ce maintien en détention malgré un cautionnement record de près de 32 milliards FCFA, illustre une volonté d’exemplarité judiciaire à visée symbolique. Dans une période marquée par la promesse de rupture et de lutte contre la corruption, l’inflexibilité de la justice financière apparaît comme un message politique autant que judiciaire : aucun filet d’influence ou de fortune ne protège désormais face à l’appareil d’État. Les magistrats, eux, évoquent des risques de disparition de preuves, de pressions sur les témoins, notamment des agents du Trésor et de concertation avec des complices. Ils ajoutent, dans leur arrêt, la crainte d’un trouble à l’ordre public, au vu de la sensibilité de l’opinion à ce dossier perçu comme emblématique des abus de l’ancien système. Mais la défense dénonce une posture d’acharnement. Selon Me Beydou Diagne, « toutes les conditions légales sont réunies pour accorder la liberté provisoire, mais l’instruction semble évoluer sous la pression d’une volonté politique de faire un exemple ».Dans un contexte où la gouvernance se veut plus transparente, la détention prolongée de Tahirou Sarr, figure connue du monde des affaires, interroge sur les frontières entre justice, communication politique et instrumentalisation des grands dossiers économiques. À mesure que l’instruction progresse, la tension monte : jusqu’où ira l’État dans sa croisade contre l’impunité économique ? Et à quel prix pour l’équilibre des droits fondamentaux ?

Publications similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *