Dossier Mancabou : Me Patrick Kabou dénonce une justice de façade
Trois ans après la mort controversée de François Mancabou, les auditions ont timidement repris. Mais selon Me Patrick Kabou, avocat principal de la famille, interrogé par L’Observateur, la relance du dossier tient davantage de l’effet d’annonce que d’une véritable volonté de faire éclater la vérité.
Dans son édition de ce jeudi, L’Observateur revient sur les dernières évolutions dans l’affaire François Mancabou, ce militant décédé en détention au commissariat central de Dakar en 2022, alors qu’il était gardé à vue dans le contexte des tensions politiques de l’époque. Le journal révèle notamment que Pape Mamadou Seck, ex-membre présumé des « Forces spéciales » interpellé au même moment que Mancabou, a été récemment entendu par la justice. « Cela fait trois ans qu’on nous balade », a confié Me Patrick Kabou au quotidien du groupe Igfm. « Trois ans de déplacements pour rien. Trois ans de souffrance vaine pour la famille Mancabou. »
Me Kabou regrette également un épisode marquant de février 2025 : la convocation, puis l’annulation soudaine, de l’audition de l’épouse de François Mancabou. Préparée de longue date par le cabinet de Me Kabou, cette audition avait mobilisé plusieurs membres de la famille depuis la France. Certains ont appris l’annulation à l’aéroport de Paris, d’autres à leur hôtel à Dakar. « J’en ai eu honte. Elle en est tombée malade », déplore l’avocat.
La robe noire depuis sa terre d’asile à Paris,, dénonce également l’inaction persistante du parquet sur plusieurs éléments qu’il juge cruciaux. L’absence de transmission de vidéos-clés.Des doutes sur les raisons réelles de l’arrestation de Mancabou.Des soupçons de manipulation des preuves vidéo. L’avocat évoque également une plainte déposée en 2023 auprès de la Division de la cybercriminalité contre un individu ayant pisté François Mancabou peu avant sa mort, et qui s’est fait passer pour un ambulancier auprès de la famille :« On a tout : son nom, son numéro, ses coordonnées. Rien n’a été fait. »
Autre révélation : l’existence d’une vidéo de 13 minutes que certaines parties présenteraient comme une preuve. Une tentative, selon Me Kabou, de construire une version favorable à la thèse officielle. « Nous, nous avons le récit détaillé de François Mancabou lui-même : des noms, des grades, des responsabilités. J’espère que personne n’aura le toupet de venir avec un montage arrangé pour soutenir une version bancale. En l’absence de Me Kabou lors des premières auditions, c’est Me Amadou Diallo, son collègue au sein du pool d’avocats de la famille, qui a supervisé les interrogatoires. Dans les colonnes de l’Obs, il a préféré ne pas commenter le contenu des auditions, évoquant « des raisons techniques » et une stratégie procédurale
Face à ce qu’il qualifie de « théâtralisation de la justice », Me Kabou estime que le dossier n’avance que sous pression médiatique ou politique. « Une justice digne ne s’active pas parce qu’un témoin s’exprime publiquement. Ce travail devait être fait depuis trois ans. On ne lynche pas un homme après sa mort, surtout quand il ne peut plus se défendre. » Le cabinet reste clair. Tant que les garanties d’une instruction équitable ne sont pas réunies, il refusera de se prêter à une « mise en scène procédurale »..