FADP 2023 : des dérives pointées par Habibou Dia, «45 % des fonds hors des entreprises de presse»
Alors que le Fonds d’appui au développement de la presse (FADP) fait actuellement l’objet d’une profonde réforme, le Directeur de la Communication, Habibou Dia, revient sur les dysfonctionnements observés en 2023 et les nouvelles orientations envisagées pour redonner de la crédibilité à ce mécanisme d’aide publique.
Une gestion jugée opaque
« L’année dernière, dans les conditions dans lesquelles nous avons trouvé le FADP, j’ai dit au ministre que je ne souhaitais pas en être l’administrateur. Le décret en vigueur conférait à une seule personne les fonctions d’administrateur de crédit et d’ordonnateur de dépense », déclare Habibou Dia. Une configuration qu’il juge en totale contradiction avec les principes de transparence et de bonne gouvernance. « On ne peut pas détenir les fonds et en même temps décider seul de leur exécution. Cela viole toutes les normes en matière de finances publiques. »
Une cartographie floue des bénéficiaires
Autre source de dysfonctionnement : l’absence de critères clairs pour identifier les véritables entreprises de presse. « Il n’y avait aucun instrument permettant de distinguer les véritables médias des autres. Comment, dans ces conditions, répartir équitablement l’enveloppe ? », s’interroge-t-il. Une situation qui, selon lui, a contribué à une gestion hasardeuse des ressources du fonds. Près de 45 % des crédits alloués en 2023 n’auraient ainsi pas été dirigés vers les entreprises de presse. « Le décret prévoit certes des lignes pour la formation ou d’autres activités, mais quand un fonds est conçu pour soutenir prioritairement les médias, cela traduit un problème de gestion. » Un audit de l’Inspection générale d’État (IGE) est d’ailleurs en cours et devrait prochainement rendre ses conclusions.Pas de FADP en 2024. Dans ce contexte, le FADP ne sera pas reconduit pour l’année 2024. « Légalement, les conditions n’étaient pas réunies. C’est dommage pour nous tous », regrette le Directeur de la Communication. Il précise que seul le chapitre « investissement » de la Loi de finances permet un report de crédit, ce qui n’est pas le cas ici. Habibou Dia tient à rappeler un principe fondamental inscrit dans le Code de la presse : « L’État peut accorder une aide si les conditions optimales sont réunies. Il ne dit pas que l’État est obligé. »
Un regard tourné vers l’avenir
Malgré cette période transitoire, le Directeur de la Communication reste confiant. Il évoque notamment une future augmentation des enveloppes sectorielles, combinée à la mobilisation d’un fonds d’urgence. « Si les patrons de presse font leurs calculs, ils pourraient se retrouver avec une enveloppe bien plus conséquente que ce qu’ils auraient perçu sur deux années cumulées. »Enfin, concernant les médias frappés par un arrêté de cessation de diffusion, Habibou Dia précise : « Ils ne sont pas fermés. Cette mesure suspend simplement les canaux de communication, en attendant une meilleure vulgarisation du cadre légal. »